Dans le cadre du programme de lutte contre le harcèlement à l’école, Gabriel Attal a annoncé la généralisation des « cours d’empathie » à la rentrée 2024, une méthode importée du Danemark où elle est mise en place depuis 2007. Différents exercices doivent apprendre le respect de l’autre pour empêcher les comportements violents. La méthode a fait ses preuves mais est-elle transposable à la France ?
Le modèle danois a prouvé son efficacité contre le harcèlement
Le modèle danois a été particulièrement mis en avant par le ministre de l'Éducation national qui s'est rendu dans le pays scandinave à la fin du mois de septembre. Il repose en particulier sur les « cours d'empathie », que Gabriel Attal a pu observer mais qui n'est qu'une composante d'une méthode plus complète visant à prévenir le harcèlement pour faire en sorte qu'il ne se produise pas
Installé depuis 2007 par deux ONG, le programme « Fri for Mobberi » (libéré du harcèlement), s'est inspirée d'une initiative australienne nommée « better buddies » (de meilleurs copains). Elle est axée autour de quatre valeurs fondamentales : la tolérance, le respect, le soin et le courage. Elle s'adresse aux plus jeunes, depuis les tout-petits, les bébés en crèche, jusqu'à l'équivalent du CE2. Ce programme éducatif met en place, entre autres, des activités comme des discussions autour de la situation d'exclusion ou de la notion de consentement.
Une enseignante qui expérimente la méthode depuis le début, a détaillé son expérience dans cet article du Huffington Post. Au-delà des heures de cours dédiés, la professeure inclut la méthode dans chacun de ses cours et ses interactions avec ses élèves de 6 à 9 ans. Pour les travaux en équipes, par exemple, c'est elle qui choisit les pairs pour favoriser la collaboration afin qu'aucun enfant ne soit laissé à l'écart. En cas de dispute lors des récréations, elle leur demande : « Comment est-ce que vous pouvez montrer du respect l'un pour l'autre ? Quel compromis pouvez-vous trouver ? » Durant le cours d'empathie, il arrive que les élèves fassent des dessins avec les doigts sur le dos de leur voisin, afin de mimer l'histoire racontée par les maitresses. Et à la fin du cours, chaque élève remercie son voisin. L'objectif est d'apprendre à avoir des contacts chaleureux. Au cœur de cette approche, il y a « la volonté d'inculquer aux enfants l'idée que chacun a sa place dans le groupe et dans la communauté », précise l'auteure de l'article.
"Jeux de rôles"
Mis en lumière par Gabriel Attal, les « cours d'empathies » sont aussi appelés « jeux de rôles ». Les élèves sont encouragés à se mettre à la place de différents personnages, le rôle de la victime visant à développer l'empathie, celui du harceleur ayant pour but de faire prendre conscience de ses responsabilités. Quant au témoin, il est encouragé à signaler la situation aux adultes.
Mascotte
La mascotte de la classe compte parmi les interfaces préférées de cette méthode. Cette peluche fournie par le programme est toujours présente en classe pour servir d'outil pédagogique et pour réconforter les élèves. Les parents doivent aussi participer à cet apprentissage de l'empathie et de la solidarité dans un effort conjoint avec les enseignants. Grâce à ce programme, le Danemark est un des pays européens où le taux de harcèlement scolaire est le plus bas. Selon une enquête de l'Institut national de santé publique de l'Université de Syddansk, en 20 ans, le pourcentage de garçons de 11 à 15 ans victimes de harcèlement quelques fois par mois est passée de 15% à 6% et celui des filles de 14 à 9%. En 15 ans, « Fri for Mobberi » s'est implanté dans 60% des crèches, 62% des maternelles et 46% des écoles primaires et garderies périscolaires.
Des tests en France
En France, la méthode est testée depuis la rentrée 2022 dans 18 écoles maternelles du 18ème arrondissement et à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). Elle a été étendue dans de nouvelles écoles des 19ème et 20ème arrondissement de Paris ainsi qu'à Eragny (05) et Montreuil (Seine-Saint-Denis) à la dernière rentrée. Un projet pilote en crèche a aussi été lancé dans le 18ème arrondissement parisien et à Saint-Ouen : « Le but est de travailler sur la dynamique de groupe et la communauté tout en développant les compétences socio-émotionnelles des enfants », précise Margot Neuvialle, coordinatrice du programme à la Ligue de l'enseignement de Paris dans un article du Huffington Post.
Cette méthode danoise s'est accompagnée d'un volet législatif. Une loi, adoptée en 2017, exige que toutes les écoles primaires et secondaires disposent d'une stratégie et de plans d'action anti-harcèlement. Les élèves et parents peuvent déposer une plainte auprès d'une instance de recours si l'établissement scolaire ne dispose pas de stratégie ou s'il offre une réponse inexistante ou insuffisante à des cas concrets d'intimidation. Un autre élément à transposer en France ?