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Photographie d'enfants jouant ensemble

© Andrey Kuzmin / Adobe Stock

Professeur pendant 35 ans à l’école Steiner de Colmar, Guy Chaudon est désormais formateur d’enseignants dans un des deux centres de formation que compte la fédération des écoles Steiner en France.

Quelles sont les bases de la pédagogie Steiner ?

Guy Chaudon : L'idée de base de Rudolf Steiner, philosophe de la fin du 19e siècle, était celle d'une école unique qui s'étend de trois ans à dix-huit ans et qui regroupe trois, voire quatre écoles afin qu'il y ait un mélange des âges. Deuxième idée, le centre de cette pédagogie résulte non pas d'une théorie à appliquer sur les enfants mais de l'élaboration d'une observation fine du développement de l'enfant. De trois à six ans, nous laissons l'enfant s'épanouir essentiellement par le jeu, par un environnement naturel qu'il peut imiter et qui lui offre l'espace nécessaire à sa créativité innée. Il s'agit d'une pédagogie de "liberté" où les pédagogues accompagnent le petit enfant qui évolue et grandit librement dans un jardin d'enfant. Puis à sept ans, l'enfant change, sa mémoire se développe, c'est une nouvelle pédagogie qui se met en place sans rupture avec ce qui s'était créé auparavant. C'est l'école à proprement parler. Pendant les sept années suivantes, l'accompagnement pédagogique va associer liberté et contrainte, vie et forme. L'activité artistique faisant appel à ces deux notions, elle deviendra le levier essentiel. Les professeurs du primaire vont utiliser l'élément artistique dans tous les apprentissages afin de les rendre plus imagés et vivants.

G.C : Concrètement, comment se déroule l'apprentissage ?

G.C : L'apprentissage des mathématiques par exemple, se fera sur une base musicale, à savoir celle du rythme pour apprendre les tables de multiplication. Celui de la lecture, s'appuiera plutôt sur l'image en racontant aux élèves une histoire d'où naîtra l'image d'une consonne. Le son "M" surgira de la forme des montagnes ou le son "F" de la forme des flammes d'un feu. L'enfant découvre, de ce fait, l'alphabet d'une façon imaginative et stimulante. Puis les sons découverts de la sorte seront repris par des comptines apprises par cœur et jouées théâtralement par les élèves.

Vers 13-14 ans et jusqu'à 18 ans, l'enseignement devient plus rationnel, plus scientifique, plus proche de ce qui se pratique dans les lycées. L'idée principale est de stimuler l'activité pensante, la réflexion, la logique et l'abstraction. A cet âge, c'est le "vrai" qui est développé plutôt que le "beau" dans le niveau précédent.

Y a-t-il un système de notation ?

G.C : Nous éliminons les notes, les classements et les redoublements pour éviter que l'enfant se sente jugé. Nous allons essayer de le soutenir, de le stimuler en respectant ses aptitudes et son rythme d'acquisition. Nous n'allons pas mélanger les âges car chaque âge a sa conscience. Nous cherchons à avoir des groupes d'une même maturité, avec un professeur de classe qui va accompagner les élèves du primaire pendant sept-huit ans, qui, de ce fait, les connaît très bien, et qui enseigne l'ensemble des matières afin de donner une meilleure cohérence à son action pédagogique. Il compose son cours en fonction de ses élèves et des réalités qu'il observe au quotidien. Les classes se suivent mais ne se ressemblent pas. Certaines sont plutôt musicales, d'autres plus plastiques ou littéraires. L'enseignant enseigne deux/trois heures par jour le matin dans sa classe puis, les autres matières, comme les langues ou le sport, sont enseignés par d'autres professeurs.

Les critiques disaient que le mouvement était sectaire…

G.C : … et qu'il prônait l'anthroposophie. Oui, c'est la principale critique. Depuis le début des années 2000, nous devons faire un gros travail d'explication. On peut aussi définir l'anthroposophie par le terme de science de l'esprit, "Geisteswissenschaft", comme cela est dit en Allemagne où 300 écoles Steiner accueillent 80 000 élèves. C'est une science qui veut ne pas se cantonner uniquement au matériel et au physique mais qui s'ouvre au psychique, et surtout au spirituel aussi. Cette démarche, à ce jour, est encore contestée par les universitaires. Or, les recherches spirituelles effectuées par Rudolf Steiner, éclairent notre travail d'enseignant de manière très concrète. Certes, elles font encore peur, en France où le terme "spirituel" est encore confondu au "catholicisme". Mais nous sommes convaincus qu'élargir notre conscience à une perception plus large de la nature et des hommes, aux réalités spirituelles, est un véritable enrichissement.

L'anthroposophie est-elle enseignée aux élèves des écoles Steiner ?

G.C : Elle ne rentre pas dans l'école. C'est une "nourriture" que les professeurs vont chercher, de même qu'ils vont en chercher ailleurs, afin d'affiner leurs sens et leurs cours. Non, elle n'est pas enseignée aux élèves.

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