© Photo Jean-Bernard Gallois
Nourriture, voitures électriques, costumes… Nicolas Vanier, le réalisateur du film, a voulu respecter au maximum l’environnement. Des solutions ont été mises en place pour ce tournage qui rompt avec les habitudes. Un pari gagnant ! Entretien avec Arnaud Humann, éco-référent sur le tournage du film "C’est le monde à l’envers !".
Lea.fr : Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre rôle sur C'est le monde à l'envers ! ?
Arnaud Humann : Je suis régisseur sur le film de Nicolas Vanier comme quatre de mes collègues. Notre travail est d'organiser toutes les questions matérielles pour que le tournage puisse se faire dans les meilleures conditions. Je suis également éco-référent sur ce film, c'est-à-dire chargé de suivre les engagements pris par la société de production pour faire un tournage écologique. Nous travaillons avec la société Secoya Éco-tournage avec qui nous avons défini une stratégie éco-responsable. Tout cela est venu d'une idée de Nicolas Vanier, dont on connaît l'attachement à l'environnement. Il tenait absolument à ce que C'est le monde à l'envers !, qui évoque le réchauffement climatique, soit un tournage avec le plus grand respect possible de l'environnement.
Lea.fr : Concrètement, quelles sont les principales différences avec un tournage classique ?
Arnaud Humann : Le transport est un des sujets les plus visibles. Nous avons disposé de 24 véhicules électriques durant le tournage en Bourgogne. Nous savons que le principal problème de ces voitures est la recharge dès que nous faisons beaucoup de kilomètres. C'est pourquoi nous avons loué une remorque avec six postes de recharge très rapides qui a été installée à Vézelay, à trois kilomètres de la ferme où se déroulait le tournage. Tout au long de la journée, une personne était chargée de faire les aller-retours avec les voitures. Comme Nicolas Vanier a choisi trois lieux de tournage à 50 kilomètres à la ronde de la ferme, les déplacements étaient assez limités. Par ailleurs, le transporteur Volvo nous a prêté un camion électrique qui a fonctionné lors du tournage sur Paris. Les autres camions transportant tout le matériel sont, eux, restés garés en attendant la fin du tournage.
Lea.fr : La nourriture a également été un point important ?
Arnaud Humann : Oui car Nicolas Vanier ne souhaitait pas de bouteille d'eau en plastique. Résultat, en Bourgogne, nous avions des gourdes et des verres aux prénoms des personnes présentes ainsi que des bonbonnes d'eau de 25 litres. Les bonbonnes d'eau étaient aussi de la partie durant le tournage parisien, dans une tour de la Défense.
La cantine, elle, était locale et biologique. Notre régisseuse chargée de l'alimentation allait chercher les produits dans un fourgon de 6m3, pour tous les repas de la semaine. Tous les produits frais étaient issus des potagers autour, ce qui fait de beaux volumes pour 60 à 80 personnes à nourrir chaque jour. Nous avons évité le buffet libre-service qui occasionne pas mal de gâchis et avons donné des portions individuelles à chacun. Résultat, chaque jour, nous n'avions que 200 à 900 grammes de déchets que nous avons donné aux poules, ravies de l'aubaine, dans la basse-cour de la ferme.
Lea.fr : Est-ce que cela a été difficile de prendre ces nouvelles habitudes ?
Arnaud Humann : Comme ce type de tournage est assez récent et que C'est le monde à l'envers !est le plus grand éco-tournage de France à date, il revient plus cher à la production que si nous l'avions fait dans des conditions « normales ». Elle a consenti à un gros effort financier. S'il était plutôt amusant de calculer chaque jour les déchets de nourriture qui restaient, il s'agit quand même d'un défi psychologique important car les gens n'ont pas toujours envie de remettre en cause leurs habitudes. Mais j'ai constaté que l'approche d'un éco-tournage se devait d'être légère pour être un succès. C'était un pari que nous avons eu tous envie de réussir ensemble.
Lea.fr : Comment avez-vous fait avec l'énergie ?
Arnaud Humann : Nous avons installé 24 panneaux solaires, à l'entrée de la ferme, bien cachés derrière des bottes de foin mais très efficaces. Ils ont fourni les trois-quarts de l'électricité du tournage. 40% des projecteurs, un gros poste de consommation électrique, étaient équipés de Led, qui sont moins gourmandes en énergie. L'objectif était que les nouvelles habitudes de respect de l'environnement ne gênent pas la technique, ce qui s'est avéré un défi durant les neuf semaines de tournage.
Quant aux costumes, les spectateurs ne s'apercevront sans doute pas en voyant le film qu'ils sont tous de seconde main et que la décoration est issue de recycleries.
Propos recueillis par Jean-Bernard Gallois